« Lorsque nous sommes arrivées au travail et que nous avons réalisé qu’il nous manquait du personnel et que deux d’entre nous allaient encore devoir rester la nuit, nous avons décidé qu’il fallait faire quelque chose », raconte Nicole, dont le Gleaner protège l’identité pour lui éviter des représailles. Elle fait partie d’une équipe d’infirmières du troisième étage travaillant le soir, qui a organisé un sit-in de trois heures pour protester contre le temps supplémentaire obligatoire à l’Hôpital Barrie Memorial (HBM) le 26 janvier.
La manifestation, au cours de laquelle les infirmières ont refusé de travailler ce qui est devenu un quart de nuit régulièrement imposé, était la première du genre à avoir lieu à l’hôpital d’Ormstown.
« La situation ne s’améliorait pas », déclarait Nicole à propos du temps supplémentaire obligatoire. Au cours de la semaine précédant la manifestation, les membres du personnel infirmier de soirée ont dû couvrir 11 quarts de nuit pour compenser le manque de personnel.
« On s’inquiète de savoir quand on va devoir rester huit heures de plus et si on pourra rentrer à la maison à la fin de notre quart de travail, dit Nicole. C’est un cycle permanent », déplore l’infirmière qui souligne que les quarts de 16 heures font des ravages et que les infirmières doivent souvent revenir huit heures plus tard pour le début de leur quart régulier.
Selon le Syndicat des professionnelles en soins de la Montérégie, le quart de nuit devrait comprendre cinq infirmières et deux infirmières auxiliaires, alors qu’il n’y avait que trois infirmières et trois infirmières auxiliaires pour couvrir le quart de nuit le 26 janvier.
Dans une entrevue accordée au Devoir à la suite du sit-in, la présidente du syndicat, Mélanie Gignac, expliquait que « lorsqu’il manque une infirmière, on la remplace par deux infirmières auxiliaires ». Mais une infirmière auxiliaire est limitée dans son droit de pratique. « Elle ne peut pas évaluer les patients », explique Mme Gignac, qui suggère que l’employeur n’accorde pas assez de poids à la « gravité des cas » dans ses évaluations.

Jade St-Jean, conseillère principale en communications externes pour le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest (CISSSMO), affirme que le quart de nuit au Barrie Memorial est particulièrement sous pression en raison du manque de personnel. Selon elle, les efforts de la direction de l’HBM ont permis de trouver des solutions pour combler les absences du quart de nuit en raison de la manifestation. « Des employés d’autres unités se sont portées volontaires pour faire du temps supplémentaire afin de soutenir l’équipe de l’unité, et du personnel d’agence a été appelé en renfort », explique Mme St-Jean. Les infirmières du soir ont repris le travail vers 19 heures.
Une deuxième infirmière, qui travaille au Barrie Memorial depuis 28 ans, affirme que la situation fait boule de neige depuis un certain temps. « Il est plus difficile d’attirer des gens pour travailler à l’HBM, car nous sommes un hôpital rural et plus éloigné pour beaucoup de gens », dit-elle, soulignant que par le passé, les horaires étaient bien organisés et les pénuries de personnel se faisaient rares.
« Les horaires ne sont pas aussi personnalisés et, depuis un an, nous avons connu de graves pénuries dans toutes les équipes, mais surtout dans l’équipe de nuit », explique-t-elle, en précisant que la situation entraîne une tension supplémentaire pour les infirmières qui doivent se préparer à la possibilité de faire du temps supplémentaire au début de chaque quart de travail. « Nous sommes épuisés, et franchement nous nous sentons lésés, que l’on nous prenne ainsi pour acquis ».
Les infirmières s’inquiètent également de la sécurité de leurs patients, affirmant qu’il peut être difficile de fournir des soins adéquats dans les conditions actuelles où le personnel est surmené et fatigué. Les infirmières proposent que le CISSSMO devrait s’efforcer d’offrir des horaires plus flexibles, y compris des postes à temps plein et à temps partiel, ainsi que de meilleures conditions de travail, afin d’encourager les infirmières et les infirmières auxiliaires à venir à l’HBM et à y rester.
Mme St-Jean prévient que même si les équipes s’efforcent actuellement de trouver des solutions, « la situation restera difficile au cours des prochains jours ». Elle affirme néanmoins que le CISSSMO apprécie le travail effectué par les équipes sur le terrain « qui nous permettent de maintenir les services de soins de santé à la population ».